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Loi 77

Article 1

Modifié par LOI n°2016-508 du 25 avril 2016 - art. 6

Un sondage est, quelle que soit sa dénomination, une enquête statistique visant à donner une indication quantitative, à une date déterminée, des opinions, souhaits, attitudes ou comportements d’une population par l’interrogation d’un échantillon.

Sont régis par la présente loi les sondages publiés, diffusés ou rendus publics sur le territoire national, portant sur des sujets liés, de manière directe ou indirecte, au débat électoral.

Les personnes interrogées sont choisies par l’organisme réalisant le sondage de manière à obtenir un échantillon représentatif de la population concernée.

Sont assimilées à des sondages pour l’application de la présente loi les opérations de simulation de vote réalisées à partir de sondages liés au débat électoral.

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  • Un “sondage” relatif à l’aménagement d’une halle de centre ville n’a pas été regardé par la commission comme relevant de l’article 1er de la loi, dans la mesure où, quelle que soit l’influence de la réalisation de cet aménagement pour des éléctions à venir, ce sondage ne résume pas le débat électoral. (2006)
  • L’absence de publication d’une partie des questions posées au cours du sondage, ne constitue pas, en elle même, une irrégularité (1989)

 

 

 

 

 

Compétences Qu'est ce qu'un sondage d'opinion ?

Décisions

1 Champ de l’article 1er de la Loi
La notion de sondage électoral

 

1-1

 

CE 12 novembre 1984 Vaillant

 

Considérant ... que le sondage en cause relatif aux élections des membres des conseils d'administration des organismes de sécurité sociale n'entrait pas dans le champ d'application de cette loi; qu'ainsi, la lettre du président en date du 17 janvier 1984 comportait une simple information et ne constituait pas une décision administrative faisant grief, susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir; que, dès lors, les conclusions dirigées contre les indications contenues dans cette lettre ne sont pas recevables.

 

1-2

 

Décision de la commission des sondages 12 avril 2006


– Un “sondage” relatif à l’aménagement d’une halle de centre-ville n’a pas été regardé par la commission comme relevant de l’article 1er de la loi, dans la mesure où, quelle que soit l’influence de la réalisation de cet aménagement pour des élections à venir, cette enquête d’opinion ne résume pas le débat électoral. (2006)

 

1-3

 

Décision de la commission des sondages le 22 septembre 2006


Les sondages relatifs à une consultation comme celle qui a été organisée le 14 mai 2006 en vue de connaître l’opinion des électeurs de Sainte-Marie-sur-Mer sur une éventuelle fusion de la commune de Pornic avec celle de Sainte-Marie-sur-Mer – consultation prévue par la loi, n° 71-588 du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes, modifiée par la loi n°96-142 du 21 février 1996 –  à la différence des « referendum » ne sont pas visées par l’article 1er de la loi 77.808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d’opinion. Elles n’entrent pas dans le champ d’application de ladite loi et ne relèvent par suite pas de la compétence de la commission des sondages instituée par l’article 5 de cette loi.

 

2 Sondage d'opinion et données nominatives

 

CE 9 juillet 1997 Syntec


 Considérant qu'un sondage, comportant des questions qui demandent aux  personnes interrogées ce qu'elles pensent d'une personnalité, ne contient  pas des informations qui s'appliquent à celle-ci au sens de l'article 4  précité de la loi du 6 janvier 1978 ; qu'un tel sondage n'a d'autre objet  que de chercher à obtenir, par une méthode d'échantillonnage, l'état, à un  moment donné, de l'opinion de la population, au sens statistique de ce  terme, sur la personnalité qui fait l'objet du sondage ; que, dans ces  conditions, il ne résulte ni des dispositions des articles 4 et 34 de la  loi, ni d'aucune autre disposition, que les résultats, obtenus à partir du  dépouillement des réponses aux questions, constitueraient des  informations nominatives concernant cette personnalité ; que celle-ci ne  saurait, par suite, être titulaire du droit d'accès organisé par l'article  34, ni des droits de communication, de rectification et d'effacement qui  en découlent ; qu'elle ne peut, dès lors, ni avoir accès à ce sondage sur  le fondement de la loi du 6 janvier 1978, ni exiger de savoir qui a  commandé ledit sondage à l'institut qui l'a réalisé ;

 

3 Contrôle de la formulation des questions d'un sondage d'opinion

 

3-1

 

CE 11 décembre 1987 IPSOS


Considérant, d'une part, que la commission a fait grief aux deux sondages  qui ont fait l'objet de la mise au point attaquée d'avoir induit en erreur  les personnes interrogées par la SOCIETE IPSOS, ou orienté leurs réponses,  contrairement aux prescriptions de l'article 3 du décret du 16 mai 1980  pris pour l'application de l'article 5 de la loi ci-dessus mentionnée du  19 juillet 1977 ; qu'il ressort des pièces du dossier que la principale  question des sondages consistait à demander aux personnes consultées pour  qui elles voteraient si, le jour même, avait lieu le premier tour de  l'élection présidentielle ; qu'elles pouvaient indiquer la personnalité de  leur choix, sans liste préétablie de candidats ; qu'ainsi cette question  appelait une réponse fondée davantage sur la notoriété ou sur la  popularité des personnalités que sur les intentions réelles de vote ; que  cette ambiguïté se révèle d'ailleurs dans la présentation donnée par le  journal aux résultats des sondages, publié sous le titre : "La cote de  popularité des présidentiables" ; qu'il suit de là que la commission était  fondée à estimer que les questions ainsi posées pouvaient induire en  erreur les personnes interrogées ou orienter leurs réponses ;

 

Mise au point de la commission des sondages du 23 juin 2006

La commission relève en outre que les termes dans lesquels est formulée la question relative à l’implantation locale de Mme ... sont de nature à avoir influencé les réponses faites par les personnes interrogées tant à cette question qu’aux trois suivantes.
Les résultats publiés, en ce qui concerne ces questions, sont dès lors dépourvus de caractère significatif.
Dans ces conditions, la commission des sondages émet les plus expresses réserves sur leur fiabilité.

Décision de la commission des sondages du 4 avril 2007

Dans une hypothèse où l’on soumet en ligne des déclarations de personnalités politiques à un échantillon d’internautes, la commission ne retient pas, en l’espèce, le grief tiré du choix des propos, alors même que ceux-ci apparaissaient relativement consensuels pour un candidat, et plus “clivants” pour un autre candidat.

 

3-2 : Questions relatives au second tour

 

Mise au point de la commission des sondages du 9 janvier 2007

Dans le cadre du contrôle du sondage relatif à l’élection municipale à Toulouse [...], la commission des sondages a relevé une discordance entre les candidatures testées dans l’hypothèse d’un premier tour, qui n’ont pas été publiées, et celles testées dans l’hypothèse d’un second tour qui ont fait l’objet d’une publication. Cette différence entre les personnalités soumises au choix des personnes sondées amène la commission à formuler toutes réserves sur la portée des résultats publiés.

 

Décision de la commission des sondages du 23 mars 2009

 

Pour les sondages publiés avant le premier tour, s’il est souhaitable que les instituts envisagent, dans la mesure du possible, plusieurs hypothèses de second tour, la commission admet toutefois qu’une seule hypothèse soit testée dès lors que ce choix est cohérnt avec les résultats obtenus s’agissant du premier tour.

 

4 Contrôle de l’échantillon

 

4-1 : Contrôle de la composition de l’échantillon

Mise au point du 21 septembre 2006

Si le sondage réalisé [...] sur le choix du candidat socialiste à l’élection présidentielle n’appelle pas d’observations particulières quant aux méthodes utilisées par l’institut, la commission des sondages considère que sa présentation aurait dû être accompagnée à titre de précaution des mentions suivantes :
"le sondage a été réalisé auprès d’un échantillon de sympathisants de gauche et de sympathisants socialistes alors que le candidat socialiste sera désigné par les seuls adhérents du PS"

 

 

4-2 : Contrôle de la taille de l’échantillon

Mise au point du 21 septembre 2006


eu égard à la taille fort réduite du sous-échantillon de sympathisants socialistes, les résultats obtenus doivent être interprétés en tenant compte de la marge d’erreur importante qui les affecte.

 

4-3 : Contrôle des échantillons d’internautes

Décision de la commission des sondages du 4 avril 2007

En ce qui concerne une enquête réalisée exclusivement en ligne : dans la mesure où il ne s’agit pas d’un « panel » (échantillon permanent interrogé d’une vague à l’autre), un échantillon est considéré comme représentatif, dès lors qu’il est composé à partir d’une liste d’internautes ayant préalablement accepté d’être interrogés par l’institut, et que des règles limitant la fréquence des sollicitations pour une même personne ont été fixées.

 

 

 

 

5 Contrôle de la qualité du travail des instituts de sondage

 

C.E. 13 décembre 1985
Société Indice.


...en vertu de l'article 1er du décret du 16 mai 1980 pris pour l'application de la loi du 19 juillet 1976, " les opérations concourant à la réalisation, à la publication et à la diffusion des sondages d'opinion définis à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 doivent être effectués de manière à en assurer la qualité et l'objectivité " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient à la commission des sondages, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, chaque fois que la qualité ou l'objectivité d'un sondage lui paraît en question, de demander la publication d'une mise au point appropriée quels que soient les résultats dudit sondage ; que par suite, le moyen tiré de ce que la commission a constaté que le sens général du résultat ne lui apparaissait pas en cause compte tenu de l'écart constaté entre les candidats doit être écarté ;

Cons. que la commission a pu légitimement estimer qu'un sondage effectué dans la rue, en une seule journée, auprès de 600 personnes, à raison de 30 interrogations ou plus par enquêteur, comportait des risques d'erreurs difficilement maîtrisables ...

 

 

 

6 Utilisation d’une enquête qualitative pour un sondage relatif à des intentions de vote

 

Décisions de la commission des sondages du 28 novembre et 12 décembre 2006

28 novembre 2006
L’utilisation d’une enquête qualitative dans le cadre d’un sondage d’intentions de vote compte au nombre des méthodes acceptées par la commission des sondages. L'enquête qualitative doit être opérée dans le même temps que le sondage sur les intentions de vote et auprès des mêmes personnes.
12 décembre 2006

Si les résultats publiés d’un sondage d’intentions de vote ont été déterminés pour partie par une enquête qualitative, la notice doit le mentionner expressément et comprendre l’ensemble des éléments de ladite enquête qualitative.

 

 

7 Contrôle des effets de la diffusion d'un sondage d'opinion

 

C.E. 23 janvier 1984


Élections municipales d’Étampes.

La diffusion dans la commune, pendant la semaine précédent le scrutin, d’un tract présentant les résultats d’un sondage d’opinion qui étaient favorables à la liste constituée par la municipalité sortante a été faite en violation des prescriptions de l’article 11 de la loi du 18 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusions de certains sondages d’opinion et a été, dans les circonstances de l’affaire, de nature à altérer la sincérité du scrutin.

 

 

8 Condamnation de la publication des données brutes d'un sondage

 

8-1 Condamnation de la publication des résultats bruts

Mise au point du 14 mars 1995

 

Par ailleurs, la commission réprouve et condamne la diffusion, faite sans l’aval de l’institut qui a réalisé le sondage, de certains de ses résultats avant tout redressement, même avec l’indication qu’il s’agit de chiffres bruts.

De tels chiffres ne correspondent qu’à une étape intermédiaire dans l’élaboration d’un sondage. En raison de l’imperfection inévitable de l’échantillon notamment en matière électorale, leur redressement est une nécessité. La diffusion des chiffres bruts, qui n’ont par eux-mêmes aucune valeur, ne peut que gravement induire le public en erreur

 

 

8-2 Mentions non-obligatoires

Décision de la commission des sondages du 9 janvier 2007

- Les personnes ayant été interrogées par téléphone, il n’était pas indispensable que cette précision figurât au nombre des mentions accompagnant la publication des résultats
- Aucun texte n’exige la mention du nombre des personnes interrogées qui ne se sont pas prononcées.

 

 

8-3 : Mentions de nature à induire le lecteur en erreur

Décision de la commission des sondages du 3 mai 2007

À propos d’un article publiant les résultats d’un sondage réalisé auprès des seuls maires d’une communauté d’agglomération, une réclamation invoquait une manipulation laissant à croire aux lecteurs que le sondage a été effectué auprès d’un échantillon représentatif des habitants de l’agglomération. La commission rejette cette réclamation, au motif qu’en dépit du titre pouvant apparaître comme équivoque, l’ensemble de l’article est suffisamment précis quant aux conditions de réalisation de ce sondage, et n’est donc pas de nature à tromper le lecteur.

 

 

 

 

9 Recevabilité d’une réclamation à l'encontre d'un sondage d'opinion


Décision de la Commission des sondages du  17 avril 2007

Une réclamation parvenue à la commission par courrier électronique ne sera pas considérée comme telle au sens de la loi, en raison de la méconnaissance de la forme requise par l’article 11 du décret du 25 janvier 1978 modifié, qui est la lettre recommandée avec accusé de réception.

 

 

 

10 Obligation de publier les mises au point résultant du contrôle d'un sondage

 

CE 22 décembre 1982 Orcival


Cons. que, dans sa mise au point, la commission des sondages était fondée  à relever et à corriger les erreurs matérielles qui entachaient les  chiffres publiés par Valeurs actuelles ; que la commission pouvait  légalement estimer que les résultats issus de sondages portant sur des  scrutins ou des élections de nature différente n'étaient pas comparables,  que leur rapprochement ne permettait pas d'en inférer valablement une  évolution de la composition de l'électorat des candidats et que, de ce  fait, les conclusions mêmes de l'étude étaient remises en cause ;  qu'ainsi, le journal Valeurs actuelles ayant effectué la publication de  sondages en altérant la portée des résultats obtenus, la commission des  sondages pouvait légalement, sans méconnaître la loi du 29 juillet 1881  sur la liberté de la presse, lui demander de publier une mise au point à  ce propos ;

 

 

11 Après l’élection, les communiqués de de la Commission des sondages ne peuvent plus être annulés

 

CE 04 septembre 1995


Considérant que les requêtes de M. MEYET sont dirigées contre des actes  intervenus dans le cadre d'opérations préalables à des élections dont les  résultats sont devenus définitifs ; que, par suite, la légalité des actes  attaqués n'est plus susceptible d'être discutée par la voie contentieuse ;  qu'ainsi il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête  de M. MEYET ;

 

12 Le coût d’un sondage d'opinion entre dans les comptes de campagne s’il est opéré au cours de l’année qui précède le scrutin

 

CE 31 janvier 1997 Élection municipale de Mende


  Considérant que, pour rejeter le compte de campagne de M. Delmas, la  commission a aussi retenu que la prise en charge, par la commune de Mende,  du coût du sondage avait fait bénéficier l'intéressé, pour la somme  ci-dessus indiquée de 36 666 F, d'un don d'une personne morale, prohibé  par l'article L. 52-8 du code électoral ;

  Mais considérant que, eu égard aux dates, ci-dessus rappelées, auxquelles  le sondage a été réalisé et la dépense y afférente engagée, ce motif  n'était pas, non plus, en tout état de cause, de nature à justifier le  rejet du compte de campagne de M. Delmas ;

 

13 La notion de publication d'un sondage d'opinion

 

CE 23 novembre 1984 Roujansky et autres.

 

…considérant que si l’article 11 de la loi susvisée du 11 juillet 1977 prohibe la publication, la diffusion et le commentaire de sondages d’opinion pendant la semaine qui précède chaque tour se scrutin, ainsi que pendant le déroulement de celui-ci, le rappel ou le commentaire dans plusieurs journaux d’un ensemble de sondages antérieurs concernant les différentes listes de résultats n’a pas dans les circonstances de l’espèce, altéré la sincérité du scrutin,ni exercé d’influence sur le résultat de l’élection.

 

 

14 Fonctionnement de la commission des sondages

 

C.E. 5 juillet 1985 Sarl IPSOS


… le gouvernement, qui était ainsi compétent pour préciser la composition de la commission, dont il a fixé le nombre des membres à 9 titulaires et autant de suppléants, par un décret en Conseil d'Etat du 9 janvier 1978, était aussi seul compétent pour déterminer, s'il l'estimait nécessaire, le quorum exigible pour que cette commission puisse valablement siéger ; que le gouvernement s'étant abstenu de le faire, il n'appartenait pas à la commission des sondages de se substituer à lui en décidant dans son règlement intérieur, par une disposition entachée d'incompétence, qu'en cas d'urgence, le quorum est de 3 membres ou suppléants " ; qu'il suit de là que dans le silence du décret seul légalement applicable, la commission des sondages ne peut valablement délibérer que si la majorité, soit 5 de ses membres titulaires ou suppléants, sont présents ;

 

 

15 L’interdiction de publication et de diffusion d'un sondage d'opinion

 

15-1 La loi de 1977 instaure une restriction à la liberté de recevoir et de communiquer des informations qui n’est pas nécessaire à la protection des intérêts légitimes énumérés par l’article 10.2 de la Convention européenne des droits de l’homme.

 

Cour de cassation 4 septembre 2001

 

....“aux motifs que les sondages réalisés dans la perspective d’un scrutin, s’ils participent à l’information des citoyens, peuvent également avoir une influence sur leur choix”, “que si le choix des électeurs doit être éclairé, il doit pouvoir s’exercer librement, c’est-à-dire dans des conditions de nature à préserver la réflexion personnelle, notamment dans les jours qui précèdent la consultation”, “que les effets du sondage relèvent ainsi de la protection des droits d’autrui au sens de l’article 10.2 de la Convention européenne”, “que le législateur a estimé, à juste titre, que la prohibition de la publication des sondages dans la semaine précédant un scrutin était une condition nécessaire de l’expression du libre choix des électeurs”, condition valable en 1977 et “qui le demeure actuellement”, “que la loi du 19 juillet 1977 ne comporte en elle-même aucune discrimination puisqu’elle est d’application générale”, que le fait que les techniques modernes ne connaissent pas de frontière (internet - minitel) “n’est pas de nature à caractériser une discrimination au sens de l’article 14 de la Convention”, “que les articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 1977 sont conformes aux prescriptions des articles 10 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme”, “qu’il y a lieu d’annuler le jugement” ;

 

“alors qu’aux termes de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, “toute personne a droit à la liberté d’expression ; ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence des autorités publiques et sans considération de frontière” ; que l’alinéa 2 de cet article dispose que l’exercice de cette liberté ne peut être soumis à des restrictions qu’à condition qu’elles “constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire”, que l’article 14 de la Convention européenne dispose que la jouissance de cette liberté doit être assurée “sans distinction aucune”, que la limitation de la liberté d’expression ne peut être limitée que par des “mesures nécessaires”, c’est-à-dire qui répondent à un besoin social impérieux, dont les cas sont énoncés limitativement dans l’article 10, alinéa 2, de la Convention européenne, que l’interdiction de publication des sondages d’opinion dans la semaine précédant un scrutin, telle qu’édictée par les articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 1977, est incompatible avec les dispositions des articles 11 et 14 de la Déclaration européenne des droits de l’homme sur la liberté d’expression, qu’elle n’a ni pour but ni pour objet une protection des droits d’autrui, qu’elle n’est pas de nature à protéger le libre choix des électeurs, qu’elle est discriminatoire dans la mesure ou les modes modernes de diffusion des nouvelles (internet, minitel) permettent à des organes de presse situés hors du territoire national, de diffuser des résultats de sondages effectués dans la semaine précédant le scrutin, alors que les organes nationaux se le voient interdire, que les restrictions imposées par la loi du 19 juillet 1977 ne constituent pas des “mesures nécessaires” à un “besoin social impérieux”, et que, dès lors, la Cour n’a pu refuser de constater l’incompatibilité des articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 1977 avec les articles 11 et 14 de la Convention européenne et renvoyer le prévenu devant la juridiction correctionnelle pour infraction aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 1977 qu’en violation des articles 11 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme” ;

 

Vu l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ;

 

Attendu que, selon ce texte, toute personne a droit à la liberté d’expression ; que l’exercice de ce droit, qui comprend, notamment, la liberté de recevoir ou de communiquer des informations, ne peut comporter de conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi que lorsque celles-ci constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, notamment à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire ;

 

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué qu’entre les deux tours des élections législatives de 1997, tenus respectivement les 25 mai et 1er juin, a été publié dans le journal “Le Parisien” daté du 26 mai 1997, sous le titre “Législatives 1er tour - ce que les Français ont voulu dire”, un sondage réalisé par l’institut CSA ainsi qu’un article analysant ce sondage et des commentaires ; qu’à la suite d’une plainte déposée par la commission des sondages , Philippe Amaury, directeur de publication du journal précité, a été poursuivi devant le tribunal correctionnel, sur le fondement des articles 11 et 12 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 et 90-1 du Code électoral, pour avoir, au cours de la semaine précédant un scrutin, publié un sondage d’opinion ayant un rapport avec l’ élection ; que le tribunal a relaxé le prévenu après avoir fait droit à l’exception soulevée par lui, prise de l’incompatibilité des textes précités avec les articles 10 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ; que le ministère public a interjeté appel du jugement ;

 

Attendu que, pour dire les textes incriminés compatibles avec les dispositions conventionnelles, annuler le jugement entrepris et évoquer, la cour d’appel se prononce par les motifs partiellement repris au moyen ;

Mais attendu qu’en interdisant la publication, la diffusion et le commentaire, par quelque moyen que ce soit, de tout sondage d’opinion en relation avec l’une des consultations visées par l’article 1er de la loi du 19 juillet 1977, les textes fondant la poursuite instaurent une restriction à la liberté de recevoir et de communiquer des informations qui n’est pas nécessaire à la protection des intérêts légitimes énumérés par l’article 10.2 de la Convention susvisée ; qu’étant incompatibles avec ces dispositions conventionnelles, ils ne sauraient servir de fondement à une condamnation pénale ;

 

D’où il suit que l’arrêt doit être annulé ;

 

Par ces motifs :

ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Paris, en date du 29 juin 2000

 

15 -2  Antérieurement, le Conseil d’État avait statué en sens inverse

 

CE 13 septembre 2000 Meyet

 

Considérant que la requête de M. MEYET est dirigée contre la  recommandation du 24 juillet 2000 du conseil supérieur de l'audiovisuel à  l'ensemble des services de télévision et de radio en vue du référendum du  24 septembre 2000 et contre la décision en date du 26 juillet 2000 de la  même autorité relative aux conditions de production, de programmation et  de diffusion des émissions relatives à la campagne radiotélévisée en vue  de ce référendum ; qu'à l'appui de cette requête, M. MEYET reproche au  Conseil supérieur de l'audiovisuel d'avoir enjoint aux services de  communication par voie de radiodiffusion ou de télévision de se conformer  aux dispositions combinées des articles 1er et 11 de la loi du 19 juillet  1977 en vertu desquelles, dans la semaine qui précède le scrutin, la  publication, la diffusion et le commentaire de tout sondage d'opinion  ayant un rapport direct ou indirect avec un référendum sont interdits, en  faisant valoir que cet article 11 de la loi du 19 juillet 1977 serait, par  suite notamment d'un changement de circonstances, devenu incompatible avec  les engagements internationaux souscrits par la France ;

 

  Considérant que le requérant se prévaut de la convention européenne de  sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui  reconnaît en son article 10, paragraphe 1, à toute personne "le droit à la  liberté d'expression" et dont l'article 14 énonce que la jouissance des  droits et libertés reconnus dans la convention doit être assurée "sans  distinction aucune fondée notamment sur ... la fortune, la naissance ou  toute autre situation" ;

 

  Considérant qu'au regard des exigences inhérentes à la hiérarchie des  normes telles qu'elles découlent de l'article 55 de la Constitution, la  juridiction compétente pour connaître d'un moyen tiré de ce qu'une  disposition législative serait incompatible avec un traité "régulièrement  ratifié ou approuvé" peut être invitée à rechercher, non seulement si  cette incompatibilité existait dès l'intervention de cette disposition  législative mais aussi si elle est apparue postérieurement ;

 

  Considérant que si l'interdiction de la publication ou de la diffusion de  sondages dans la semaine qui précède le scrutin constitue une ingérence de  la part de l'autorité publique dans le domaine du droit à la liberté  d'expression au sens du paragraphe 1 de l'article 10 de la convention  européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés  fondamentales, lequel comprend, outre la liberté d'opinion, "la liberté de  recevoir ou de communiquer des informations ou des idées", le paragraphe 2  du même article prévoit cependant que "l'exercice de ces libertés  comportant des devoirs et des responsabilités", il peut être soumis à des  "restrictions ... prévues par la loi, qui constituent des mesures  nécessaires dans une société démocratique", dès lors qu'elles répondent à  l'une ou l'autre des exigences énoncées audit paragraphe ; qu'au nombre de  celles-ci figure "la protection des droits d'autrui" ;

 

  Considérant d'une part, qu'il est constant que la restriction apportée à  la publication ou à la diffusion des sondages relatifs aux votations  trouve son fondement dans la loi ; que la raison d'être d'une telle  restriction repose sur le souci du législateur d'éviter que le choix des  citoyens ne soit influencé dans les jours qui précèdent immédiatement un  scrutin par une appréciation des résultats du vote qui peut être erronée,  sans qu'aucune rectification puisse utilement intervenir ; que l'objectif  ainsi poursuivi se rattache à la "protection des droits d'autrui" au sens  des stipulations du paragraphe 2 de l'article 10 de la convention ; qu'en  raison tant de la justification de cette restriction que de la durée  limitée de la période au cours de laquelle elle s'applique et compte tenu  de la marge d'appréciation que l'article 10, paragraphe 2, de la  convention réserve au législateur national, les dispositions de l'article  11 de la loi du 19 juillet 1977 ne sont pas incompatibles avec les  stipulations de l'article 10 de la convention ;

 

  Considérant, d'autre part, que le requérant soutient que les dispositions  de l'article 11 de la loi seraient devenues incompatibles avec les  engagements internationaux de la France, dans la mesure où, du fait de la  diffusion des résultats de sondage par des chaînes de télévision ou des  journaux étrangers, ou par les opérateurs de réseaux de communication par  ordinateurs, l'interdiction édictée par la loi aurait cessé d'être  nécessaire au sens de l'article 10 de la convention et engendrerait en  outre des discriminations entre les citoyens qui seraient contraires à son  article 14 ; que toutefois les limites auxquelles se heurte l'application  effective de l'article 11 de la loi du 19 juillet 1977 ne constituent pas  un changement dans la situation de droit engendrant entre les stipulations  de l'article 10 de la convention et la loi nationale une incompatibilité  qui ferait juridiquement obstacle, en vertu de l'article 55 de la  Constitution, à l'application de cette loi ; qu'un changement dans la  situation de fait, s'il peut conduire le législateur, dans l'exercice de  son pouvoir d'appréciation, à reconsidérer certaines modalités de la loi  du 19 juillet 1977 ou même son principe, ne saurait avoir d'incidence sur  la portée de la loi et sur l'obligation qu'a l'autorité administrative  d'en assurer l'application ; qu'en outre, eu égard à son caractère général  et impersonnel, il ne saurait être valablement soutenu que l'article 11 de  la loi du 19 juillet 1977 serait constitutif d'une norme de nature  discriminatoire au sens de l'article 14 de la convention ;

 

  Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, par les dispositions  contestées par le requérant, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a  procédé à une interprétation des règles de droit applicables qui ne  méconnaît ni le sens, ni la portée de ces règles et ne contrevient pas aux  exigences inhérentes à la hiérarchie des normes ; qu'il suit de là que ces  dispositions ne sont pas de nature à faire l'objet d'un recours pour excès  de pouvoir ; que, dès lors, la requête n'est pas recevable ;

 

  DECIDE :
Article 1er : La requête de M. MEYET est rejetée.

 

 

15-3 : durée d’interdiction de publication des sondages dans le cas d’un scrutin organisé sur deux jours

Conseil d’État, ordonnance, 2 mai 2007

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 49 du code électoral, applicable à l'élection du Président de la République en vertu du II de l'article 3 de la loi organique du 6 novembre 1962 : «Il est interdit de distribuer ou faire distribuer, le jour du scrutin, des bulletins, circulaires et autres documents. A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public, par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale. » ; que, d'autre part, les articles 1er et 11 de la loi du 19 juillet 1977 interdisent la publication, la diffusion et le commentaire de tout sondage se rapportant à l'élection présidentielle « la veille de chaque tour de scrutin ainsi que le jour de celui-ci » ; que ces dispositions législatives visent à garantir le droit fondamental de tout citoyen à l'expression libre de son suffrage ainsi qu'à assurer la sincérité du scrutin ;
[...]
Considérant, en troisième lieu, qu'en fixant du vendredi 4 mai à minuit jusqu'à la clôture du scrutin le dimanche 6 mai 2007 à 20 heures la date d'effet, sur l'ensemble du territoire national, de l'interdiction prévue par l'article 11 de la loi du 19 juillet 1977, la Commission nationale de contrôle de la campagne en vue de l'élection présidentielle et la Commission des sondages ont recherché, compte tenu tant de la répartition du corps électoral entre les bureaux de vote métropolitains et les autres que des caractéristiques particulières de la législation relative aux sondages d'opinion, un équilibre entre les différents impératifs qu'il leur incombait de concilier ; que la mesure qu'ils ont édictée ne paraît pas, en l'état de l'instruction, contraire aux impératifs de libre expression de suffrage et de sincérité du scrutin ;

 

 

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