Madame Emilie CHALAS a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 3 mars 2020, à la suite du refus opposé par le président de la commission des sondages à sa demande de communication de l'ensemble des documents détenus par la commission relatifs au sondage réalisé par l'institut IPSOS-SOPRA STERIA et publié le 24 février 2020 dans l'édition du Dauphiné Libéré, sur les intentions de vote pour les élections municipales de Grenoble de mars 2020, notamment les critères de redressement politiques détaillés utilisés (chiffres bruts, chiffres nets, grille des redressements, colonne de référence).
La commission, qui a pris connaissance de la réponse du président de la commission des sondages à la demande qui lui a été adressée, relève qu'aux termes de la loi du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion, la commission des sondages, composée de deux membres du Conseil d’État, de deux membres de la Cour de cassation, de deux membres de la Cour des comptes et de trois personnalités qualifiées, est chargée d'étudier et de proposer des règles tendant à assurer dans le domaine de la prévision électorale, l'objectivité et la qualité des sondages publiés ou diffusés tels que définis à l'article 1er de la loi.
Selon l'article 3 de cette loi, l'organisme ayant réalisé un tel sondage dépose auprès de la commission des sondages une notice précisant au minimum :
1° Toutes les indications figurant à l'article 2 et accompagnant la diffusion du sondage ;
2° L'objet du sondage ;
3° La méthode selon laquelle les personnes interrogées ont été choisies, le choix et la composition de l'échantillon ;
4° Les conditions dans lesquelles il a été procédé aux interrogations ;
5° La proportion des personnes n'ayant pas répondu à l'ensemble du sondage et à chacune des questions ;
6° S'il y a lieu, la nature et la valeur de la gratification perçue par les personnes interrogées ;
7° S'il y a lieu, les critères de redressement des résultats bruts du sondage.
Dès la publication ou la diffusion du sondage, toute personne a le droit de consulter auprès de la commission des sondages la notice prévue par le présent article et cette commission rend publique cette notice sur son service de communication au public en ligne. Selon l'article 4 de la loi, l'organisme remet à la commission des sondages en même temps que la notice, les documents sur la base desquels le sondage a été publié ou diffusé.
La commission constate que la notice relative au sondage visée par la présente demande a été mise en ligne à l'adresse suivante : http://www.commission-des-sondages.fr/notices/files/notices/2020/fevrier/9008- 02-grenoble-ipsos-france-bleu.pdf et que la demande porte précisément sur les documents qui, en application de l'article 4 de la loi du 19 juillet 1977, ont été remis à la commission et sur la base desquels le sondage a été publié ou diffusé : chiffres bruts, chiffres nets, grille des redressements « sociodémographique » ou politique, colonnes de référence.
Elle rappelle que, par une décision n° 353357 du 8 février 2012, le Conseil d’État a jugé, à propos du refus opposé par la Commission des sondages à la communication de l’ensemble des informations sur la base desquelles un sondage avait été publié ainsi que tous les détails de la méthode de redressement utilisée pour corriger les résultats du sondage, que « si, en application de l’article 4 de la loi du 19 juillet 1977, « L'organisme ayant réalisé un sondage (...) tient à la disposition de la commission des sondages (...) les documents sur la base desquels le sondage a été publié ou diffusé », la communication de ces documents, qui, lorsqu'ils sont en possession de la commission, sont, en vertu de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978 et dès lors qu’ils sont reçus par la commission dans le cadre de ses missions de service public, des documents administratifs communicables sous réserve des secrets protégés par la loi et notamment du secret des affaires, est régie par les dispositions de la loi du 17 juillet 1978 ».
La commission relève que, contrairement à ce que fait valoir Madame CHALAS, la dernière modification de la loi du 19 juillet 1977 par la loi du 25 avril 2016 n'a pas eu pour objet, ni pour effet, par les modifications adoptées (précision, dans la notice, des gratifications éventuelles, des critères de redressement utilisés ; mise en ligne de la notice par la Commission des sondages ; transmission à la Commission et non plus simple tenue à sa disposition, des documents sur la base desquels le sondage a été publié ou diffusé) de remettre en cause cette jurisprudence.
La commission considère que les documents déposés en application de l'article 4 de la loi du 19 juillet 1977, objet de la demande, dont le législateur n'a pas prévu qu'ils soient rendus publics à la différence de la notice, sont couverts par le secret des affaires, protégé par l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, lequel comprend le secret des procédés qui couvre les informations susceptibles de dévoiler, notamment, les techniques de fabrication telles que la description des matériels, logiciels ou méthodes utilisés qui traduisent un savoir-faire propre à l'entreprise et qui revêtent, de ce fait, une valeur commerciale.
La commission émet, par suite, un avis défavorable à la demande.
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Marie-Françoise GUILHEMSANS
Présidente suppléante de la CADA
[Avis n° 20201045 du 16 juillet 2020 - pdf]
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